Les étoiles pour témoin. Texte hommage aux victimes du 14 juillet

« Un camion a foncé dans la foule et a déchiré la France » : un texte d’une sublime tristesse. Lors de l’hommage aux victimes du 14-Juillet, le texte lu par Pauline Murris, la cousine de Camille Murris, victime de l’attaque sur la Promenade des Anglais, a été écrit par un ami de la famille, Marek. « Les étoiles pour témoins ». Retrouvez le texte très émouvant lu par Pauline Murris cet après-midi.
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Les étoiles pour témoins

Si nous pouvions interroger les étoiles, aurions nous accès aux vérités qui dispersent les hommes depuis la nuit des temps?

De là-haut en tous cas, elles surplombent les petits espaces clos de chacun. Qu’ont-elles vu le 14 juillet dernier sur la Promenade des Anglais? Une soirée d’été au cours de laquelle des gens se rassemblent en nombre. Une fête nationale où l’on célèbre en acte la diversité de ses racines, l’infinité de ses branches. Un feu d’artifice comme on sait les faire à Nice.

De la lumière, des couleurs, des yeux qui brillent. De la contemplation. Des petits sur les épaules de leurs papas, des mamans qui les aident à grimper et, derrière eux, des mains qui s’étreignent en attendant la suite, sur la promenade de la vie.

Puis le ciel s’est obscurcit. En dessous de lui, le tonnerre remplaçait les éclats de feu et l’orage démarrait, comme pour prévenir de quelque chose, comme si la nature annonçait les folies de tout en bas. Mais les gens marchaient encore. Ils parlaient encore, riaient encore, rêvaient d’un monde aussi juste que leurs joies simples.

L’horreur avait pourtant tranché pour eux, au mépris des étoiles que l’on voit depuis tous les continents, lorsqu’on lève un peu les yeux. Un camion a foncé dans la foule et a déchiré la France. L’onde de la mort fut terrible, de quoi taire son propre écho.

Nous ne trouverons jamais les mots. 86 anges se sont envolés trop vite en plongeant la ville dans un silence figé, jusqu’au creux des vagues de sa mer noircie. Ce silence, nous l’entendons encore.

Que verront les étoiles au dessus de nos têtes ce soir? Une soirée d’été au cours de laquelle des gens se rassemblent en nombre. Une fête nationale où l’on pleure la diversité de ses morts, l’infinité de ses victimes. Cette fois-ci, les personnes présentes aurons du mal à rire et encore plus de mal à rêver. Ils marcheront cependant dans la même direction, sur la promenade de ceux qui ont perdu la vie.

L’an dernier, ils ont vu par où le ciel s’était obscurcit. Et ils ne sont pas dupes, les Dieux des uns et les étoiles des autres n’ont rien à voir là dedans. Seule la folie des hommes est à blâmer, enrôlée par des foyers de haine stériles. Ils ont aussi vu d’où pouvait venir la lumière qui dissout les ténèbres dès qu’elle saisit le courage et le cœur des hommes. Elle n’a jamais changé de forme, mais il est bon d’en rappeler la teneur dans les temps troublés.

La lumière provient toujours d’un dialogue franc, où l’on parle quand il faut parler. Où l’on écoute, où l’on pardonne et où l’on hausse le ton parfois. Elle s’appuie toujours sur une mémoire assumée grâce à laquelle on retrouve les traces de nos vies communes. Elle éclaire enfin un espoir éternel, celui dans lequel brille l’essentiel: des gens qui se rassemblent, des enfants qui grandissent et le bruit tranquille des vagues.

Est-ce de la même lumière que sont-faites les étoiles? J’ose le croire. Les 86 anges qui scintilleront ce soir seront là pour en témoigner. »

Il était déjà l’auteur d’une « Lettre à Camille », que nous avions publiée il y a quelques jours.

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